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les villages se syndiquent entre eux (avant 1591) pour « reduyre les gens volleurs et hommes de mauvaise vye, courir sus lesdits volleurs et assassinateurs criminels. » Ces ligues campanères, ces « prétendues ligues, » ces « prétendus villages confédérés » sont d'abord vus d'un mauvais œil par l'Union officielle. Mais le gouverneur Villars et le parlement de Toulouse sont bien obligés de les tolérer, de les autoriser à s'imposer et à s'armer, et nous voyons même les délégués des communautés associées prendre séance aux États, ce qui ne les empêche pas de conclure des trêves particulières avec leurs voisins huguenots du comté de Foix'. Il y a là un véritable essai de gouvernement local.

La grande Ligue, la Sainte-Union, perdit de bonne heure des partisans (dès le début de 1590) 2, et il y eut en Comminges un parti royaliste. Cependant, la reconnaissance de Henri IV ne s'opéra pas sans difficultés; il y eut des résistances jusqu'en 15963. M. de Lestrade donne des documents qu'il a réunis une édition soignée et son commentaire est généralement exact. Une sobre introduction fait ressortir le caractère moins religieux que politique de ces événements.

Dans la série Les Protestants d'autrefois, inaugurée par M. Paul

1. Les États essayèrent vainement, en 1592, de les absorber dans une grande ligue commingeoise, placée sous l'autorité de l'Église. Le point de vue religieux apparaît peu dans les ligues campanères.

2. On parle aux États « de la division qu'est entre les habitans du pays contre l'association et Union... » (p. 172).

3. Les derniers ligueurs encourageaient les paysans à ne pas payer l'impôt royal. D'autre part ces paysans, ne comprenant rien à la volte-face des hauts personnages de la province, se croyaient trahis.

*4. Signalons une erreur sur Emmanuel de Savoie, marquis de Villars (voy. sa commission, p. 193), à qui M. Lestrade donne le prénom de son grand-père, Honorat (p. 190). Il manque quelques notices sur les noms propres. En se renfermant dans les archives muretaines, M. Lestrade s'est condamné à ne voir qu'un côté des choses, le côté le plus défavorable aux huguenots. Les quelques documents qu'il donne pour la période 1621-1632 ne sont pas suffisamment reliés par lui à l'histoire générale.

5. Ce serait (p. x) s'abuser étrangement que d'y chercher une préoccupation religieuse quelconque. » Il y a là une manifeste exagération. Assurément, les guerres civiles en vinrent très vite, surtout après 1572, à n'avoir de religieux que le nom; on en pourrait dire autant des croisades, et dire aussi que les guerres révolutionnaires n'ont pas été des guerres pour la liberté. Lorsqu'une guerre se prolonge, quelle qu'en soit la cause initiale, elle devient une guerre comme les autres, une occasion de pillage et un moyen de domination. Il n'en reste pas moins que les guerres de religion ont commencé par être des guerres religieuses. Tous les documents sont en français, sauf (p. 341) une formule d'abjuration en langue d'oc,

de Félice, M. Henry LEHR s'est chargé de la Vie et institutions militaires'. Au moyen des Archives de la guerre, des Mémoires de chefs huguenots et de quelques documents provinciaux issus du département d'Eure-et-Loir 2, il étudie successivement les armées huguenotes des guerres de religion, la situation des réformés dans l'armée française sous le régime de l'Édit de Nantes et celle des régiments protestants étrangers, les effets militaires de la Révocation, les corps de réfugiés3. Il montre, au début des guerres civiles, l'organisation militaire des huguenots calquée sur leur organisation religieuse; mais, cette organisation fédérale, les chefs la brisent lors de l'entrée en campagne pour former de nouvelles unités tactiques. Dans cette armée de croyants, M. Lehr signale, après La Noue, l'intrusion des soldats de métier, qui lui inoculent de bonne heure tous leurs vices. Il recherche les conceptions militaires des hommes de guerre et des théoriciens huguenots, La Noue, d'Aubigné, du Plessis-Mornay, les Camisards, dont il rapproche avec raison la stratégie de celle des Boers. Comme il était inévitable, M. Lehr s'est laissé trop complètement prendre par son sujet et il a tendance à considérer comme spécifiquement huguenots des usages", des habitudes que l'on retrouve dans toutes les armées du même temps. Il a raison de constater la persistance de l'élément protestant dans les troupes françaises après la Révocation, mais c'est abuser du silence des textes qu'affirmer que la liberté de conscience du soldat, j'entends du soldat français, était respectée au XVIIIe siècle. M. Lehr termine par des pages inté

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1. Paris, Fischbacher, 1901, in-12, vш-332 p. Une notice bibliographique et un index. Quelques pièces, notamment des listes de conversion.

2. C'est assez dire que, du côté provincial, l'information de M. Lehr est insuffisante.

3. Ce plan, très clair, n'est pas toujours scrupuleusement respecté. Il est question de Rohan et des Camisards (ch. vi et vii) avant le chapitre sur l'Édit de Nantes. Sur les régiments protestants étrangers (suisses), il fallait citer le Ludwig Pfyffer de Segesser.

4. Il ne connaît malheureusement que le La Noue des Discours, mais non pas la lettre aux États de Flandres de 1576. Voy. mon La Noue, p. 91 et suiv. 5. Par exemple, p. 64, celui du cantonnement.

6. P. 283 et suiv. De même, p. 186, le fait que les moines espagnols conseillaient de tuer les Français comme hérétiques ne prouve nullement que « dans les régiments qui guerroyaient en Flandres ou dans le Roussillon, la proportion des protestants ait été bien forte. » Depuis le xvr siècle, le fanatisme espagnol considérait la nation française, en bloc, comme hérétique, puisqu'elle commettait le crime inexpiable de tolérer l'hérésie. P. 21, M. Lehr a raison d'établir une distinction, pour le xvi° siècle, entre l'alliance avec l'étranger et l'appel de troupes étrangères. Mais c'est faire aux protestants la partie trop belle que de ne pas parler de la fameuse lettre adressée par les Rochelois à

ressantes sur l'organisation du service de santé à la fin de l'ancien régime.

C'est devenu un jeu de compléter l'incomplet Berger de Xivrey. M. Baguenault de PUCHESSE apporte sa part: quatorze lettres inédites (de 1589 à 1595) de Henri IV au duc et à la duchesse de Nevers', provenant de la bibliothèque de Saint-Pétersbourg".

Je ne saurais terminer cette partie du Bulletin sans loucher à une question générale soulevée récemment par M. N. WEISS, à propos de la thèse ci-dessus mentionnée de M. H. Patry. Sous ce titre, Le XVIe siècle devant le haut enseignement 3, M. Weiss proclame << qu'il serait temps enfin de faire cesser l'ostracisme dont l'enseignement supérieur semble frapper l'étude du xvIe siècle en France. »>< On pensera peut-être que le mot d'« ostracisme » est bien gros; et lorsque M. Weiss déclare que ni à la Sorbonne, ni au Collège de France, ni ailleurs on ne trouverait « un seul cours sur l'histoire du xvre siècle français,» je puis lui certifier que, s'il n'existe en effet, nulle part en France, de chaire consacrée au XVIe siècle, plusieurs professeurs, dans nos Universités, ont consacré au XVIe siècle une ou plusieurs années de cours. Dire « qu'on ne peut guère ouvrir un livre français [sur le xvI° siècle] sans y trouver peu ou point d'idées générales, une critique nulle ou insuffisante, des jugements puérils ou surannés, bref des lacunes révélant celles de l'enseignement officiel, » c'est rayer de notre littérature quelques travaux excellents, parmi lesquels je citerai seulement celui de M. Ferdinand Buisson et ceux de M. Abel Lefranc1. Il n'en reste pas moins que les observations de M. N. Weiss ont leur valeur. Le siècle qui ouvre l'âge moderne, qui pose tous les problèmes intellectuels, moraux, sociaux dont nous cherchons encore la solution, ce siècle mériterait sans doute mieux que des cours isolés, semés un peu au hasard sur les affiches

Élisabeth, le 12 nov. 1572; ils la reconnaissaient pour leur Royne souveraine et Princesse naturelle. »

1. Lettres inédites de Henri IV au duc et à la duchesse de Nevers... Paris, 1900, in-8°, 21 p. (extr. de l'Annuaire-Bulletin de la Société de l'histoire de France).

2. Copies à la Nationale, Nouv. acq. 6282. A noter, p. 11, la façon charmante dont Henri annonce à Nevers sa rentrée dans Paris : « Yl me tarde que je vous puyse fère la bienvenue an ma mėson du Louvre et cervyr de commyssayre pour vous remetre en possesyon de la vostre, laquelle j'ay nétoyée avec le reste de cete vylle des fascheus hostes quy y estoyent. »>

3. Bulletin du protestantisme français, 15 févr. 1901, p. 107-109.

4. De nombreux jeunes gens se mettent d'ailleurs à l'étude du xvr siècle. Des travaux se préparent, à l'heure actuelle, sur Guill. du Bellay, le cardinal de Tournon, etc. Mais il est très vrai que ce travail n'est encore ni organisé ni suffisamment dirigé.

blanches: une chaire de l'histoire de la Renaissance et de la Réforme ne serait pas déplacée dans quelques-unes de nos Universités, ni des conférences, spéciales à l'historiographie et à la littérature de cette période, à l'École des hautes études'. Il y a évidemment un intérêt national à éviter le désagrément que M. N. Weiss nous fait prévoir : «Et il arrivera sans doute comme cela est arrivé, par exemple, pour l'étude du vieux français, que nous nous occuperons de cette histoire quand on s'en sera occupé à l'étranger. » Quod omen Di

avertant!

XVIIE SIÈCLE. Philippe de Béthune, frère de Sully, fut ambassadeur à Rome de septembre 1601 à juin 1605. On était encore au lendemain de l'absolution du roi, et l'Espagne était, ou se croyait, à Rome toute-puissante. Heureusement, Béthune pouvait compter sur un pape avisé, timoré mais sage, Clément VIII Aldobrandini. A force de souplesse, d'ingéniosité, il arrive à reconstituer dans le sacré collège un parti français; il fait un pape, Léon XI; il joue le rôle d'arbitre souverain, d'accord avec le cardinal de Joyeuse, dans le conclave d'où sortit Paul V. La correspondance de Béthune était conservée au château de Sully. M. l'abbé CouZARD 2 nous donne le résumé de ces documents, auxquels il a joint quelques originaux et copies conservés à la Bibliothèque nationale et des pièces des Archives vaticanes. Comme on peut s'y attendre, le livre présente un réel intérêt général c'est, vue de Rome, l'histoire de quatre années de la politique européenne. La conspiration de Biron, la succession d'Élisabeth et l'avènement de Jacques Ier, les menées du jésuite Persons contre les catholiques loyalistes anglais, protégés par la France, la question de la Valteline, la prise d'Ostende, la conspiration d'Henriette d'Entragues, la lente préparation du conclave qui devait se réunir à la mort de Clément VIII, les intrigues du second conclave, tels sont les sujets sur lesquels M. Couzard apporte, sinon des détails tout à fait nouveaux, du moins une note qui manquait encore, la note romaine3.

Le travail, analysé plus haut, de M. C. Cabrol sur Clairac nous avait conduits en Agenais. C'est à la même province que se rapportent

1. Satisfaction partielle vient d'être donnée à ce vou, en ce qui concerne l'histoire littéraire, par la nomination de M. Lefranc à l'École des hautes études. 2. Une ambassade à Rome sous Henri IV (sept. 1601-juin 1605) d'après des documents inédits. Paris, Picard [1900], in-8°, x-416 p. Thèse de la Faculté des lettres de Bordeaux.

3. Il aurait pu, quoi qu'il en dise dans sa préface, être moins avare de documents. Les fautes d'impression, malgré un erratum insuffisant, sont en nombre. La p. 225 répète la p. 18 (sur la naissance du dauphin). P. 269, pour que soit intelligible la phrase de Philippe III sur son ambassadeur, il faut retraduire le mot « un correcteur » en espagnol et lire : « un corregidor. »>

les volumineuses Études de M. le Dr L. COUYBA'. Il s'agit ici de la Fronde, qui commence en Agenais par une révolte contre l'insupportable hauteur du duc d'Épernon. Condé bénéficie de ces dispositions. Cependant, la ville d'Agen reste dans une large mesure fidèle à la royauté. Un de ses consuls, Bernard de Faure, ose résister en face au peu endurant vainqueur de Rocroy, et, devant les barricades d'Agen, Condé trouve une seconde Lérida. Aussi d'Harcourt s'appuiet-il sur cette place. Contre Bordeaux révolté, Agen devient le centre du royalisme en Guyenne: on y transfère le Parlement, on y rétablit la chambre de l'Édit.

Pour retracer cette histoire de cinq années, M. le Dr Couyba s'est livré à des recherches prodigieuses. On se fera difficilement une idée de la masse énorme de documents de toute provenance qu'il cite ou qu'il analyse. Évidemment, ses deux volumes ne sont pas d'une lecture facile, et les lignes générales du sujet y sont noyées sous l'abondance touffue des détails. Mais ils seront indispensables à qui voudra désormais étudier la Fronde en province, et même la Fronde tout court; car M. Couyba n'a pu raconter la Fronde en Agenais sans parler beaucoup de la Fronde en Guyenne, et un peu ailleurs.

Sous ce titre, La Noblesse française sous Richelieu2, M. le vicomte G. D'AVENEL réédite, en un format plus maniable et en supprimant les références, le livre II de son ouvrage sur Richelieu et la monarchie absolue. Un seul chapitre (et dont les éléments sont pris à d'autres parties de l'ouvrage ci-dessus) a été intercalé dans le texte primitif il a pour objet la noblesse d'église 3.

« Ce livre n'est pas une œuvre de polémique. » Tel est l'Incipit de Bossuet et le protestantisme, étude historique par M. L. CROUSLÉ, et, de bonne foi, l'auteur a cru faire, en l'écrivant, un pas décisif « vers cette réconciliation et cette paix religieuse qui fut l'objet de la constante préoccupation de Bossuet. » Je doute fort que le succès couronne cette espérance. M. Crouslé se croit impartial, et le voilà qui part en guerre contre « des partis violents, en posses-

1. Études sur la Fronde en Agenais et ses origines. 1er fasc.: le Duc d'Épernon et le parlement de Bordeaux (1648-1651). Villeneuve-sur-Lot, R. Leygues, 1899, in-8°, 160 p. 2° fasc.: D'Harcourt et le prince de Conde. La fin de la Fronde (1651-1653). Ibid., 1900, in-8°, 492 p. La table, dite cependant générale, et l'index ne portent que sur la seconde partie.

2. Avec le surtitre Étude d'histoire sociale. Paris, Colin, 1901, 1 vol. in-18, 361 p.

3. La numérotation des chapitres a été changée, parfois aussi leur titre. Par exemple, le chapitre VI: « Les mariages et les mœurs, » est devenu : « Les mariages

et la filiation. »

4. Paris, Champion, 1901, 1 vol. in-8°, xiv-289 p.

REV. HISTOR. LXXVII. 1er FASC.

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