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acteurs anglais s'installent au Boulevard, où règne Madame Saqui, célébrée par Banville; les Funambules font recette, et la pantomime trouve un génial interprète dans Debureau. Le mélodrame se transforme; on introduit dans les drames populaires l'histoire vécue de la Révolution et le début de la légende napoléonienne, que reprendra notre époque actuelle; la Porte-Saint-Martin grandit, et le tragi-mélodrame ouvre la voie aux tentatives et aux querelles aujourd'hui surannées du romantisme.

La monarchie de juillet supprime, puis rétablit la censure, et laisse s'ouvrir de nouveaux théâtres : Renaissance, Historique, Opéra-National, où se confondent tous les genres et tous les répertoires; et toujours domine au « boulevard du Crime » la Porte-Saint-Martin.

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Cet historique fait par M. A. avec une exactitude et un soin diligents est suffisamment précis, - encore que manquant trop de documentation, et ne laisse pas d'avoir un intérêt assez présent. Car je crois qu'il a songé, — quoique sans guère le dire encore, tion du théâtre populaire, de ce « divertissement social une image à peu près fidèle de ce qui constitue notre vie morale. » Dans cette conclusion de deux pages à peine réside ce qui, à mon sens, constituerait la thèse utile, dont les trois cent soixante-treize pages précédentes ne sont que la préface. Peut-être, ceci dit, regretterais-je l'ordonnance du livre. Mais quoi! M. A. voulait faire un historique avec quelques citations curieuses à l'appui. Avons-nous le droit de lui demander autre chose? Pourtant, qu'il me pardonne mon insistance. Quelque proportion plus exacte entre les deux parties. nécessaires de l'œuvre eût sans doute captivé davantage. L'exposé d'idées vaut mieux même que des prodiges d'érudition et, de notre temps, l'érudition elle-même « n'est que littérature », comme disait ce pauvre Verlaine.

Est-il utile d'ajouter ici que M. Albert parle son livre dans une série de conférences faites avec le concours de Madame Marie Samary et de quelques autres artistes des deux sexes? Elles ne manquent point assurément d'intérêt et sont suivies de scènes et de chansons.

Pierre BRUN.

FAGUET (Émile). Le libéralisme. Paris, Société tranç. d'impr. et de librair. 1902. In-18 de xvII-300 p.

I

Le plan du nouveau livre de M. Faguet repose sur une idée singulièrement hardie, c'est qu'il n'y a pas de droits de l'homme; qu'à vouloir les énumérer, on ne réussit qu'à exaspérer ceux qui les méconnaissent ou à mettre en appétit ceux qui voudraient en accroître

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le nombre au gré de leur cupidité; que, par conséquent, le plus sage est d'accorder à l'État en principe qu'il est souverain sauf à lui prouver que l'intérêt public et la délicatesse lui interdisent d'user des pouvoirs qui ne sont pas indispensables à son unique mission, l'ordre dans la rue et la protection de la frontière. On pourra objecter que ce dernier point, cette limitation étroite du véritable devoir de l'État étant fort difficile à faire admettre, il est dangereux de reconnaîaux gouvernements une entière souveraineté. Heureusement M. F. avec le sens penétrant qu'il ne perd jamais au milieu de ses plus grandes hardiesses, suggère une définition qui facilite beaucoup la difficile rédaction des droits de l'homme : l'individu a le droit d'être respecté dans ce qu'il est, dans ce qu'il a; il a droit à la vie, à la propriété, en ce sens qu'on n'a pas le droit de le tuer, de le dépouiller; il n'a de droits sur autrui que dans la limite des contrats qu'il a passés, mais son corps et son âme, sa conscience et les fruits de son travail sont également sacrés, à quelque condition, à quelque opinion qu'il appartienne.

Au reste ce qui importe, c'est la force, avec laquelle M. F., établit chacune des libertés nécessaires. Sur plusieurs d'entre elles, il avait eu déjà l'occasion de s'expliquer; mais son plaidoyer pour la liberté d'enseignement est neuf de tout point; il tient qu'on n'a pas plus le droit d'interdire la propagande d'une doctrine au nom de la liberté qu'au nom de la vérité, que c'est une contradiction de réclamer au nom de la liberté le monopole de former les esprits; la liberté de penser consiste non à croire qu'on est libre, mais à penser librement ce que l'on veut; contraindre un homme à se croire libre c'est autant le violenter que si on le forçait à croire qu'il ne l'est pas.

On peut d'ailleurs s'en fier à M. F. pour ne pas nous donner un simple catalogue raisonné des libertés qu'il réclame. Il indique avec profondeur les raisons sur lesquelles elles se fondent : dans un tout petit État qui ne forme guère qu'une grande famille et où tout le monde pense à peu près de même, le gouvernement pourrait, sans trop faire souffrir personne, assumer le soin de penser pour tous; mais dans une grande nation, et dans une grande nation moderne, il en va tout autrement. Depuis que le christianisme a déposé dans les âmes l'idée de la séparation des domaines de la loi civile et de la loi religieuse, depuis que les sciences et les doctrines philosophiques se sont multipliées à l'infini, l'unité des âmes ne peut plus être que dans l'égal patriotisme de toutes les opinions également respectées par la patrie.

Un autre mérite, peu commun chez les hommes aussi radicalement libéraux que M. F. consiste à éviter le tort où donnèrent les libéraux de l'Empire, acharnés, comme il arrive trop souvent chez nous depuis 150 ans, à saper les vérités dont on abusait contre eux. Il estime que le gouvernement, pour tout ce qui tient au maintien de

l'ordre et à la défense extérieure, n'est jamais trop armé; s'il va un instant trop loin en assurant que la loi a bien le droit de punir l'émeute mais non l'excitation à l'émeute, il stipule expressément que la liberté d'écrire trouve toujours une limite dans les nécessités d'ordre militaire. Il ne veut pas, et avec raison, que tous les fonctionnaires soient indistinctement soumis aux mêmes obligations que les agents politiques, mais il reconnaît que tous sont tenus à respecter les lois fondamentales de la nation et la personne de ses chefs.

Enfin, ce que d'autres appellent le tort d'un parti, il l'appelle courageusement le tort de tous les partis dans la France contemporaine : << Ils réclament, ils veulent et ils font un gouvernement faible contre l'étranger et fort à l'intérieur. Ils désarment du côté de l'étranger, mais ils arment contre une partie de la patrie, ce qui est armer contre la patrie. » (p. 293-294). Ce fond d'intolérance que chaque parti dissimule dans l'opposition et arbore au pouvoir, il dit en terminant qu'il n'espère guère nous en corriger; mais il promet d'y travailler, et tous les partis qui n'ont point passé un pacte avec la Fortune devraient souhaiter qu'il y réussît.

II

Charles DEJOB.

M. Faguet est comme ces causeurs qui, plus ils causent, plus ils sont brillants et parfois éblouissants. L'éminent académicien produit article sur article, volume sur volume. Jamais il n'a eu plus de verve que dans ce dernier. Il excelle à rajeunir un sujet par la vivacité de la forme et la netteté d'arêtes de l'argumentation. Je n'irai pas jusqu'à dire que celle-ci soit toujours chez lui aussi solide qu'elle est scintillante. Ici elle séduit tout d'abord par la simplicité du point de départ. Il s'agit d'établir sur un fondement solide les droits de l'état et de poser sous forme de droits de l'individu tout ce qui ne rentre pas dans les fonctions de l'État logiquement déterminées et circonscrites. Pour le commun des mortels, cette délimitation des droits de l'État et de ceux des citoyens ne va pas sans quelque embarras, ni sans quelque tâtonnement. M. Faguet rappelle à ce propos, non sans malice et en entrant dans le détail, combien à cause de leur point de départ métaphysique, les Déclarations des Droits de l'homme et du citoyen renferment de contradictions et de lacunes, ce qui ne l'empêche pas de constater aussi combien, sous les principes abstraits, il y a, dans les Déclarations, de revendications objectives répondant à des droits historiquement violés ; et de les proclamer, « dans leurs lignes générales, le charte même du libéralisme. » Seulement M. F. ne veut pas et il a raison, de l'homme «< libre en naissant. » L'homme est un être sociable qui n'a de droits que ceux qui sont compatibles avec l'existence d'une société. Comment reconnaître et déterminer ces droits ? M. F. pré

tend le faire à l'aide d'un simple postulat : L'État a, dit-il, une et n'a qu'une mission: assurer la police à l'intérieur, et à l'extérieur la sécurité du groupe qui s'est constitué autour de lui sous forme de nation précisément pour obtenir ce double résultat. Tout ce qui ne rentre pas dans ce double rôle de l'État est usurpé par lui et doit être rendu à l'initiative libre des citoyens. Voilà un criterium simple et qui, sauf sur des points de détail, permettra une discrimination facile entre ce que l'État peut faire légitimement et ce qu'il prétend illégitimement pouvoir et devoir faire. Avec quelle ingéniosité subtile M. F. tire toutes les conséquences de son postulat, en passant dans une revue successive toutes les attributions actuelles de l'Etat ou réclamées pour l'État, je n'ai pas besoin d'y insister; mais je ne puis dissimuler l'inquiétude croissante avec laquelle je l'ai suivi à travers les conclusions qu'il prétend déduire de l'application de son criterium. J'ai senti de plus en plus, à la lecture et à la réflexion, combien ce criterium renfermait d'indéterminé et soulevait d'incertitudes. Il m'a suffi d'ailleurs, pour me le prouver à moi-même, de relever quelques-unes des affirmations de l'auteur sur certains devoirs de l'État qu'il pose, sans même les discuter, comme des obligations toutes naturelles et évidentes des pouvoirs publics: celle-ci par exemple à propos de la liberté d'enseignement : « L'État n'a rien à voir dans les choses d'enseignement. Il a seulement à savoir si un collège pratique les choses de l'hygiène... et n'est pas un refuge d'immoralité. » Ou celle-ci, au sujet de la toilette des femmes : « L'État ne peut empêcher les femmes de porter des toilettes de mauvais goût, pourvu que la pudeur soit sauve. » Je suis loin de contester que l'État n'ait un devoir de contrôle sur ces chapitres; mais comment le faire rentrer plus que d'autres dans le fameux criterium: faire la police à l'intérieur et la sécurité à l'extérieur ?

On ne le peut qu'en étendant beaucoup les termes mêmes de la définition du mot police: et si on le fait sur ce point, pourquoi ne le ferait-on pas sur d'autres ? Et n'est-ce pas au fond ce qu'ont fait et ce que font tous ceux qui ont voulu ou veulent accroître les attributions de l'État ? N'est-ce pas parce que pour eux la police de l'État ou la défense de l'État comportent pour les citoyens toutes sortes de restrictions ou d'obligations qui leur paraissent indispensables à ce double objet ou à l'un ou l'autre de ces deux objets ? Qu'était-ce que la République de Platon, et qu'était-ce que Sparte, sinon des cités organisées spécialement au point de vue guerrier et si vous voulez dire que le but de la cité doit être de se défendre et non d'attaquer, comment prouverez-vous que la vraie façon de se défendre n'est pas souvent d'attaquer quand il en est temps encore et en prenant les devants? Et pour constituer à son maximum la force défensive d'un État, jusqu'où ne pourrait-on aller en fait de restriction des libertés individuelles, à commencer par celle des mariages et de la libre pro

création des futurs défenseurs de la cité? Ne faudra-t-il pas encourager le patriotisme, et décourager le cosmopolitisme, et par là ne vat-on pas avoir prise sur la totalité de l'éducation, sur la presse, sur l'association? Laisserez-vous se répandre l'anarchisme ou le tolstoïsme qui désarmeront d'avance vos soldats? Et alors où est la liberté d'association ?

Je ne pose ces questions que pour indiquer combien il est malaisé de partir d'un principe absolu pour délimiter les fonctions de l'État : Sur l'esprit général et les tendances libérales de son livre, je suis le plus souvent d'accord avec M. Faguet tout en différant d'avec lui sur plusieurs points importants d'application. Je me sens plus que lui obligé de tenir compte de l'histoire des mœurs, des faits acquis, du loyalisme ou du caractère anti-constitutionnel des partis. Je crois qu'il sera toujours imprudent, et d'ailleurs impossible dans la pratique, de résoudre à priori les questions politiques et sociales: l'important c'est l'orientation principale à choisir et à suivre. Celle que conseille avec une chaleur communicative l'auteur de Libéralisme à ses contemporains est d'autant plus recommandable qu'elle n'est pas généralement le plus en faveur auprès des jeunes générations. Il gâte seulement sa thèse en la présentant sous une forme trop paradoxale : « L'État est un mal nécessaire, respectable, à qui nous devons de la reconnaissance; il n'est pas un bien en soi. Il est un mal comme une cuirasse ou une épée... » A ce titre toute institution sociale serait un mal. En réalité elle ne le devient qu'en outrepassant ses fonctions. Ce n'est pas l'État cuirasse ou épée qui est un mal : C'est l'État toucheà-tout. Il ne faut pas compromettre le libéralisme par une critique exagérée de la notion de l'État. « Le gouvernement, disait Benjamin Constant, en dehors de sa sphère ne doit avoir aucun pouvoir : dans sa sphère il ne saurait en avoir trop. » Reste à déterminer cette sphère. M. Faguet a voulu mesurer d'un coup de compas le rayon qu'il convenait de lui donner. Il y faudrait, je crois, moins de simplisme et accorder plus de latitude à l'expérience des choses, cette règle suprême des organisations politiques et sociales.

Eugène d'EICHTHAL.

La philologie romane et les lettres françaises ont fait une perte cruelle, irréparable en la personne de GASTON PARIS, et d'autres que nous ont déjà déploré la fin prématurée de l'éminent académicien, qui fut un des tout premiers de sa génération, un de ceux qui représentaient et personnifiaient la France intellectuelle avec le plus d'éclat aux yeux de l'étranger, un homme rare et véritablement supérieur qui joignait à l'érudition la plus sûre, au plus vaste savoir, à la critique la plus perçante tant de bonté, de douceur et de générosité. Mais nous ne pouvons oublier qu'il fut un des principaux collaborateurs de la Revue critique et l'un de ses fondateurs. Il avait créé la Revue en 1866 pour faire progresser la science,

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