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est le maître de Jean comme de Théodore de Mopsueste, un adversaire d'Apollinaire; c'est un des représentants les plus distingués de l'exégèse littérale et positive de l'école d'Antioche. Malheureusement, ses tendances dualistes en christologie, communes à toute son école, le rendront suspect aux temps qui suivront le concile d'Éphèse. Son œuvre sera rejetée dans l'ombre comme favorisant le nestorianisme.

M. H. a eu un devancier dans La Croze qui a revendiqué le premier ouvrage pour Diodore de Tarse. En 1895, il est vrai, M. Papadopoulos Kerameus en a donné une nouvelle édition d'après un manuscrit de Constantinople, et ce ms., du x° siècle, l'attribue à Théodoret. Cette indication n'a pas grande autorité; car les objections de Maran sont très fortes. Mais le manuscrit nouveau permet de rétablir l'ordre et le texte des Quaestiones, défigurés dans le seul manuscrit connu auparavant, le ms. de Paris 450 (de 1364). Dès lors, M. H. établit les propositions suivantes : l'ouvrage ne peut avoir été composé avant 365 ni après 378, avant l'édit qui chassa les évêques orthodoxes rétablis par Julien ni après la mort de Valens; la doctrine enseignée est spécifiquement antiochienne, les formules trinitaires sont celles. des Cappadociens, ce qui n'est guère possible chez un tiers avant 370; l'auteur connaît la Bible syrienne et écrit en Syrie; il est au courant de la polémique de Julien contre le christianisme et la réfute çà et là; c'est un savant, un aristotélicien, un ascète; rien ne prouve que ce soit un évêque. Tous ces traits réunis ne conviennent guère qu'à Diodore. M. H. fait ensuite la preuve de son opération, en comparant les Quaestiones et Responsiones avec ce que nous savons et ce que nous avons de Diodore.

L'attribution à Diodore des Quaestiones ad orthodoxos entraîne l'attribution des deux autres recueils de Quaestiones: ad Christianos, ad Gentiles. Ces trois ouvrages ont le même auteur, comme l'avaient déjà reconnu Maran et Otto.

La Confutatio dogmatum Aristotelis est dédiée à un prêtre Paul. Les points de contact et les sujets communs sont assez fréquents avec les trois autres écrits pour que Maran, Otto et Gass aient admis comme vraisemblable l'identité d'auteur. M. H. ajoute quelques arguments en faveur de cette thèse.

A la suite de son étude, M. H. a traduit en grande partie les quatre ouvrages, « dans l'espoir que, sous cette forme, ils seront mieux compris... et lus! >>>

Une conclusion résume les caractères généraux d'après les Quaestiones et responsiones séparation de l'« hellénisme », tendance morale fondée sur la liberté de la volonté, méthode strictement logique et dialectique, répugnance au mysticisme et spécialement au platonisme, distinction très nette des deux natures dans le Christ, assomption volontaire par le Christ des faiblesses humaines pour

rendre visible son humanité, dureté impitoyable à l'égard des hérétiques, des Ariens surtout. On a reconnu quelques-uns des traits qui distinguaient l'école d'Antioche.

Le païen combattu dans les trois autres ouvrages paraît avoir été Thémistius, dont le rôle tombe précisément à cette époque et à Antioche.

Un appendice présente quelques arguments en faveur de l'attribution à Diodore de l'Expositio rectae fidei. Il existe deux recensions. de cet ouvrage. Contre Draeseke, M. H. admet que la plus longue est l'originale. Cela, M. Funk l'avait établi déjà en 1896 (cf. Abhandlun gen, II, 253-291). M. Harnack aurait dû citer ce travail. M. Voisin,, L'Apollinarisme, p. 256, place l'Expositio après le ive siècle, je crois que M. Funk n'est pas loin de la même opinion, cf. ib., p. 260. Paul LEJAY.

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P. S. Depuis que cet article a été écrit, j'ai reçu: F. X. FUNK, Le Pseudo-Justin et Diodore de Tarse (Extrait de la Revue d'histoire ecclésiastique), Louvain, 1902; 25 pp. in-8°. M. Funk repousse la thèse de M. Harnack. Sur plus d'un point il paraît avoir raison. M. F. ne discute que les Quaestiones ad orthodoxos. La christologie. des questions 7 et 8 est plus avancée qu'on ne l'attendrait de Diodore. Mais, d'autre part, les passages où l'auteur parle de la prédominance de l'hérésie (question 143) nous reportent plus près de son temps. « Le pouvoir passe tantôt aux mains des chrétiens, tantôt aux hérétiques, tantôt aux Hellènes » : contrairement à ce que dit M. F., cette assertion doit convenir à une époque voisine à la fois du triomphe de l'arianisme et du règne de Julien, comme le suppose M. Harnack. L'argumentation de M. Funk n'est nullement convaincante ici. De même, sur la doctrine du Saint-Esprit (question 129), M. Funk ne réussit pas à démolir le raisonnement de M. Harnack. Ici et là, M. Funk fait appel, pour résoudre les difficultés, à des pas. sages pris dans d'autres questions. C'est supposer l'unité d'auteur. Or, la discussion de MM. Funk et Harnack, où ils semblent avoir tour à tour raison et tort, inclinerait à croire que ces questions proviennent peut-être d'une même école, mais non pas d'une même personne. On aurait là une solution pour bien des difficultés. Ne pas. oublier que les deux manuscrits présentent un ordre et un contenu très différents. Un tel ouvrage est à tiroirs; rien n'est plus facile que d'y ajouter ou d'y retrancher. Quant à savoir si réellement Diodore de Tarse y a collaboré, on ne peut former là-dessus que des conjectures : « Diodore nous est trop peu connu » (Funk). Il y aurait lieu d'étudier de près la langue et le style. Les relèvés de Harnack sont très insuffisants; les pp. 963-964 de Funk se bornent à la terminologie dogmatique. Peut-être une comparaison minutieuse permettrait, ou d'écarter l'hypothèse de remaniements et d'additions, ou de la confirmer et de distinguer plusieurs mains.

Carl WALHUND. Die altfranzosische Prosaübersetzung von Brendans Meerfahrt nach der Pariser Handschr. Nat.-Bibl. fr. 1553, von neuem mit Einleitung, lat. und altfr. Paralleltexten, Anmerkungen und Glossar. Upsal, Almqvist et Wiksells; Leipzig, Harrassowitz, 1900; in-8° de xc-335 p.

M. Wahlund nous donne dans ce volume, dont une partie était imprimée depuis longtemps', deux versions en prose française de la Navigatio Brendani. La première, celle du ms. 1553 de la B. N., avait été publiée dès 1836 par A. Jubinal dans un volume naturellement devenu très rare; ce texte est, par son étendue, sa pureté et sa date (v. 1285), un des spécimens les plus précieux de l'ancien dialecte picard. M. W. l'a jugé digne, non seulement de la réimpression, mais d'un dépouillement méthodique; ce dépouillement a été exécuté dans l'Introduction (p. XLIX-LXXXI), où toutes les formes sont relevées dans l'ordre des parties du discours, et dans un Glossaire, où elles reparaissent dans l'ordre alphabétique, avec renvois au texte et rappel du mot latin correspondant 2. En regard de cette version est imprimé un texte latin, qui n'a pas la prétention d'être critique : c'est, comme l'appelle l'éditeur, un « Kompromisstext», simplement destiné à faciliter la lecture de la version française 3. A la suite de cette version est imprimée celle du ms. 1716 de la Bib. Mazarine, et, en regard, le texte latin du ms. 15076 de la Bib. Nat. Par une ingénieuse disposition typographique, la comparaison des deux versions est rendue facile la première occupe les pages 1-101, la seconde les p. 102-202, et les pages de chaque série se correspondent ligne pour ligne. Vient ensuite le fragment conservé aux Archives du Doubs (avec reproduction photographique) et, en regard, le passage latin correspondant d'après le ms. 13496 de la Bib. Nat.

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L'intérêt de la publication étant surtout linguistique, M. W. eût pu se borner là: il a voulu y ajouter, outre une riche Bibliographie (p. LXXXVI-XC), deux longs chapitres sur l'histoire du saint, sa légende, les sources de celle-ci, et les mss. latins et français (p. 1xXLIV). Je n'ai pas qualité pour dire exactement ce que ces deux chapitres apportent de nouveau; mais quand l'auteur n'aurait fait qu'y condenser les résultats de travaux aussi nombreux que dispersés et difficilement accessibles, quand il se serait borné à orienter le lecteur dans une question aussi compliquée, il aurait encore par là bien mérité de tous ceux qui n'ont pas fait de cette question une étude par

1. A l'usage des élèves de l'auteur; mais il n'a été publié qu'à la fin de 1901. .2. Un relevé des traits phonétiques eût été également le bienvenu; M. W. y a suppléé, dans une certaine mesure, par celui des principales particularités dialectales (voy. plus loin).

3. Il est à peine besoin d'ajouter « qu'il ne s'y trouve aucune construction, aucun mot, aucune forme qui ne se rencontre dans l'un ou l'autre des manuscrits latins >> (p. LXXXVI).

ticulière. Ce sont en revanche des recherches originales (entreprises à Upsal sous sa direction) sur le rapport des versions en prose, que M. W. a résumées d'une façon un peu brève à notre gré (p. xxxvii, note); s'il n'a pu en donner un tableau d'ensemble définitif, il a du moins réussi à les distribuer en groupes sûrement distincts et il a ainsi préparé les recherches futures. Pour faciliter ces recherches, il a imprimé in extenso, en colonnes, un assez long passage d'après tous les manuscrits connus.

A ceux qui connaissent les publications antérieures de M. W. je n'ai pas besoin de dire avec quel soin méticuleux, avec quelle «< acribie »> toujours en éveil sont exécutées toutes les parties de ce travail. Il va sans dire que ces qualités n'en excluent pas d'autres dans les notes jetées au cours du « relevé des formes » et ailleurs, M. W. a fait preuve des connaissances les plus précises sur les derniers travaux consacrés aux sujets qu'il aborde 2. Il semble avoir, par un excès de modestie, réduit au strict minimum la portion de son ouvrage où il eût pu aisément les mettre en pleine lumière : ainsi il a soigneusement relevé toutes les particularités dialectales du texte de 1553 (p. LXXVI-LXXIX), mais, pour déférer à un désir de M. Foerster, dont les élèves étudient ce sujet, il a renoncé à tirer de ses constatations leur conclusion naturelle et à se prononcer sur la patrie du texte. Il eût pu en revanche, sans risquer de désobliger personne, développer un peu plus les remarques (p. LXXXI-II) sur le rapport de la traduction avec l'original. Il a noté l'extrême littéralité de cette traduction, qui donne au style un tour singulièrement embarrassé et parfois obscur; il eût pu citer des exemples de constructions, non seulement pénibles et lourdes, mais contraires aux règles, et qui n'apparaîtront qu'à l'époque où le latinisme fit rage: par ex. du subjonctif au lieu de l'indicatif après com, au sens de lorsque 3, du subj. dans une proposition subordonnée, de qui, en tête d'une proposition équivalant à et ille. Le traducteur était un très pauvre latiniste, sous la plume duquel abondent contre-sens et non sens : il eût été intéressant

1. Cette partie de l'Introduction est complétée par d'érudites « remarques » sur le texte du ms. 1553 (p. 227-258), où sont consignées de nombreuses observations sur les noms propres, les termes techniques, et des rapprochements avec les textes similaires.

2. On s'étonne de ne pas lui voir citer (p. LIV, n.) à propos de vuin (= gain) l'important article de M. A. Thomas (Romania, XXIX, 25 et Essais de philologie, p. 371). Les curieuses formes celebraste, trouveraste (29, 25) pour celebras tu sont relevées au Glossaire, mais elles eussent mérité une remarque: elles doivent correspondre aux formes t' pour tu devant une voyelle (t'as pour tu as) si fréquentes dans les textes picards du XIe siècle, dans Huon de Bordeaux par ex. 3. Voy. p. 3, 1. 9; 5, 5; 15, 25; 17, 14; 21, 6 et passim. Sur cette construction aux xve et xvie siècles, voy. Huguet, Syntaxe de Rabelais, p. 196.

4. Di me dont cist oysiel soient (unde sint).

5. 19, 25; 25, 24 etc.

de rechercher si toutes ces fautes proviennent de l'ignorance du traducteur ou de la corruption de l'original '.

Il y a une autre raison qui contribue à rendre cette traduction fort pénible à lire : c'est le grand nombre de mots omis par le scribe (souvent par suite d'un bourdon). Je ne verrais aucun inconvénient à ce que l'éditeur d'un texte, même rigoureusement « diplomatique », avertît le lecteur de lacunes de ce genre (soit en insérant quelques points, soit en soulignant les mots latins non traduits) et évitât ainsi au lecteur de pénibles soubresauts. Car, enfin, les textes diplomatiques euxmêmes sont faits pour être lus. Oserais-je hasarder à ce propos le désir qu'on les ponctuât? Non, ce serait trop révolutionnaire... Et pourtant, si l'on y réfléchit, remplacer par une ponctuation intelligente les points jetés un peu au hasard dans les manuscrits, serait-ce donc faire à ceux-ci une violence beaucoup plus scandaleuse que celle qui consiste à user de majuscules ou à résoudre les abréviations? A. JEANROY.

Karl LAMPRECHT. Zur jüngsten deutschen Vergangenheit. Erster Band: Tonkunst, Bildende Kunst, Dichtung, Weltanschauung. Berlin, Gaertner, 1902, in-8°,

pp XXI, 471.

M. Lamprecht a interrompu l'exposition de sa Deutsche Geschichte pour nous donner un volume d'histoire contemporaine, qui avec un autre qu'il nous promet, sera le couronnement de son grand ouvrage. Ce premier volume complémentaire traite de l'évolution artistique et intellectuelle des trente dernières années environ du XIXe siècle en Allemagne; le second retracera pour la même période l'évolution économique et sociale. L'un et l'autre seront comme deux flambeaux à l'extrémité de la route où nous devons accompagner l'auteur. On connaît ses théories en histoire, son dessein de la borner à étudier, à fixer et à suivre les principales transformations de la « psyché nationale». On peut donc admettre sa méthode régressive et lui concéder qu'à mieux connaître le nervosisme contemporain, nous compren

1. Par ex. 15, 9 resoignies traduit vexatorum; 21, 7, propres vens, prosper ventus ; 73, 19 se retornoient, se retinebant. Il peut encore arriver que l'altération porte sur la traduction même : p. 5, 6 lesqueles est écrit, par anticipation sur la ligne suivante, au lieu d'un mot représentant euge; 9, 7 tenu est pour venu (revertentes); 5, 11 conversion pour conversation; 17, 10 fisent (du reste peu lisible) doit être pour prisent (sumebant).

2. Les exemples seraient innombrables; en voici quelques-uns empruntés aux premières pages (je supplée d'après l'original ou la traduction du ms. 1716): 3, 20: et [volu] iestre. — 5, 25: quant li espasse [d'une eure]. 7, 14 en tel maniere

[a ele esté].

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-9, 16:

7, 30: nous ne savions en quele [partie il se departoit] ou. en glorefiiant [Dieu]. · 11, 22 apielės [sieges]. — 15, 13 prisent [leur vaissiaus]. — 15, 27: je [le] voi.

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