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En fait, ce que les défenseurs de ce système considèrent de préférence, ce ne sont pas les mots khmers, bien qu'ils constituent après tout le fond de la langue, ce sont les mots indiens. Le cambodgien, surtout le cambodgien. littéraire, est mêlé dans une forte proportion de mots sanscrits ou pâlis, dont l'orthographe est généralement exacte, mais dont la prononciation barbare a de quoi surprendre, parfois même embarrasser un sanscritiste. Or il est, dit-on, un moyen très simple de lui épargner cette surprise et cet embarras c'est de transcrire les mots, non d'après leur prononciation, qui est vicieuse, mais d'après leur orthographe, qui est correcte.

Observons tout d'abord qu'on peut couper court à toute hésitation en ajoutant, entre parenthèses, à la forme cambodgienne la forme originale, par exemple thor (* dharma), bon (* punya). En second lieu, le mode de transcription que nous proposerons plus loin permet de passer sans difficulté d'une forme à l'autre. Il n'y a donc pas lieu, pour épargner un léger effort à quelques sanscritistes, d'en imposer un considérable à tous ceux qui ont à se servir du cambodgien sans connaître le sanscrit.

La transcription littérale n'est pas pratique: mais est-elle scientifique ? On l'a prétendu ; on la désigne même par le nom de « transcription scientifique ». Il est difficile de savoir sur quoi s'appuie cette prétention. Car enfin la transformation des sons à travers l'espace et le temps est, au premier chef, un objet de science; et on ne voit pas ce qu'il y a de particulièrement scientifique à la dissimuler. Il ne saurait être plus scientifique d'écrire en cambodgien nagar pour nokor que d'écrire en français garten pour jardin ou riding coat pour redingote.

Veut-on dire par là que l'écriture a conservé un état ancien de la langue dépassé par la prononciation; qu'en calquant la transcription sur cette écriture, nous saisissons l'évolution du langage à un stade plus voisin des origines et par suite plus favorable à l'analyse linguistique?

Il paraît en effet résulter de la comparaison du khmer avec les dialectes de la même famille que la Lautverschiebung qui a transformé les sonores sanscrites en sourdes et quelques sourdes en sonores n'est pas un fait primitif, mais le résultat d'une évolution postérieure à la fixation du langage par l'écriture.

L'assertion que l'écriture ne représente pas seulement une convention, mais une prononciation ancienne, est donc justifiée, non toutefois sans certaines exceptions.

Ainsi l'orthographe de certains mots sanscrits a été altérée, apparemment sous l'influence de la prononciation: or, si cette altération graphique est postérieure à la transformation phonétique dont nous venons de parler, il va de soi que les signes nouveaux ont été employés avec une autre valeur que les anciens. Par exemple les mots skr. pavit(ra) et samay(a) sont communément écrits ya eti, et se prononcent bôpit et sômei; écrire pūbit et sūmai, c'est

produire des mots au moins hypothétiques: car il se peut que la voyelle ait été ajoutée précisément pour noter la prononciation o du skr. a, et dans ce cas, les mots pūbit et sumai n'auraient jamais été en usage.

Les mots

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phlon (*bhlön) « feu », et à phnom (*bhnam) « montagne »,

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sont écrits dans les inscriptions 5 vlen (=
(= blen),

d

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A cette époque, la consonne initiale n'était pas aspirée. Si elle a reçu l'aspiration après être devenue sourde, ou si les deux faits ont été simultanés, la translittération *bhlön, *bhnam ne répond à aucune réalité ni moderne, ni ancienne.

Ainsi, en appliquant la transcription dite scientifique, on risque d'introduire dans la science des formes qui non seulement n'existent plus, mais qui mème peuvent n'avoir jamais existé.

Elle n'est pas non plus sans inconvénient pour les études de linguistique comparative. Supposons que l'on veuille comparer la phonétique du khmer avec celle d'un parler congénère, mais sans écriture. Comment noterons-nous cet idiome qui n'existe, lui, qu'à l'état oral? Allons-nous lui appliquer les conventions adoptées pour le khmer ou reproduire simplement en lettres latines les sons de la voix ? Dans le premier cas, il nous faudra noter des sourdes par des sonores, des consonnes identiques par des signes différents, des voyelles différentes par le même signe, sans que ce système bizarre trouve sa justification dans une écriture qui n'existe pas. Dans le second cas, nous aurons deux systèmes de notation, l'un littéral pour le khmer,l'autre phonétique pour le dialecte; ce n'est sans doute pas le meilleur moyen de faciliter les comparaisons. On peut s'en rendre compte en examinant un travail, d'ailleurs estimable, où ce système a été employé (1). On y trouve les rapprochements suivants: Bahnar, kon ; Stieng, kon; Khmer, kun. Si on concluait de là à une différence entre le vocalisme du khmer et celui des deux autres dialectes, on se tromperait le mot est kon en khmer comme en stieng. Un peu plus loin, on lit: dan, ælter. Camb. «sehen »; tin, Khmer, id. Or dan est simplement la prononciation de tin: le mot est le même dans les deux dialectes.

Ces exemples, qu'il serait aisé de multiplier, suffisent à montrer que la translittération n'est guère mieux adaptée aux recherches linguistiques qu'aux nécessités pratiques. L'écriture est un important témoignage historique, dont il faut tenir grand compte, non toutefois au point d'en faire l'unique base de la transcription.

Un autre système s'offre à nous, c'est celui qui consiste à noter simplement les sons, abstraction faite de l'écriture: il est encore moins recommandable que le premier. On ne peut songer à fonder une notation régulière sur un élément aussi instable que la prononciation, qui varie avec les temps et les lieux, avec la

(1) P. W. Schmidt. Die Sprachen der Sakei und Semang auf Malakka und ihr Verhältniss zu den Mon-Khmer-Sprachen, La Haye, 1901.

condition de celui qui parle, avec l'ouïe plus ou moins fine de celui qui écoute. On n'aboutirait qu'à la confusion.

On a encore proposé d'employer concurremment les deux systèmes, selon la nature du travail : dans un récit de voyage, on userait de la notation phonétique; dans un ouvrage d'érudition, de la notation littérale. Il y aurait une orthographe ésotérique à l'usage des savants et une orthographe exotérique pour le vulgaire. Cette combinaison ingénieuse n'aurait d'autre résultat que de compliquer encore une matière qu'il importe de simplifier: elle n'a aucune chance de succès.

Il reste une dernière solution: c'est de choisir une transcription unique, qui satisfasse à la fois aux besoins de la philologie et à ceux de la pratique, en tenant compte à la fois de l'écriture, qui est l'élément fixe du langage, et de la prononciation, qui en est l'élément vivant. Elle suffira aux exigences de la philologic, si les mots romanisés peuvent être retranscrits avec certitude dans l'écriture originale, qui est l'instrument indispensable de toute étude philologique. Elle suffira aux besoins de la pratique, si ces mots romanisés peuvent, moyennant quelques conventions préalables, être prononcés d'une manière intelligible pour une oreille indigène.

Voici le tableau de la transcription que nous proposons. Il comprend : 1o le caractère cambodgien; 2o la transcription adoptée par nous ; 3° la transcription littérale de ce même caractère, selon le système des indianistes. Nous avons, autant que possible, évité les signes diacritiques. Nous avons cherché à utiliser dans la plus large mesure les ressources de la typographie indo-chinoise, au risque de choquer les habitudes européennes par l'usage de signes inusités ailleurs que dans notre colonie, car il ne s'agit pas de réaliser le meilleur des systèmes possibles, mais le plus convenable au pays où il doit être mis en œuvre (1).

(1) L'habitude traditionnelle est de donner la série des voyelles en prenant pour consonne d'appui ☎ et ☎. La fâcheuse ressemblance de ces deux caractères typographiques occasionnant d'incessantes confusions, nous avons cru devoir choisir de préférence leurs aspirées

et W.

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